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Date d'ajout : 21-08-12

Pussy Riot : C’est tout l’Occident qui fustige la sentence judiciaire

Les Pussy Riot punies par deux ans d’emprisonnements dans les camps, le verdict russe n’est pas compris par les sociétés occidentales qui se dressent d’une seule voix contre le régime de Poutine. Petit tour d’horizon des réactions.

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Nadejda Tolokonnikova et ses collègues des Pussy Riot ne regrettent pas leur geste.

Vendredi 17 août, un tribunal de Moscou condamne Nadejda Tolokonnikova, Ekaterina Samoutsevitch et Maria Alekhina, trois membres du groupe punk Pussy Riot à deux ans d’emprisonnement dans un camp. Leur faute ? Avoir chanté dans une église un texte anti-Poutine (voir la scène en vidéo).

Si les sbires du souverain président russe sont toujours aussi actifs pour verrouiller tout soubresaut d’opposition, la condamnation se justifie officiellement par le désordre provoqué dans un lieu de culte : « Les Pussy Riot se sont mises en scène d’une façon qui choque les croyants dans leur foi », a déclaré la juge avant d’accuser les trois punkettes d’avoir « violé l’ordre public » par des actes « d’hooliganisme » et de « vandalisme motivé par la haine religieuse ».

Le verdict ? Deux ans d’emprisonnement dans un camp. Le jugement, disproportionné selon l’opinion publique mondiale, a provoqué une cascades de réactions. Voici les principales à retenir en ce mardi 21 août.

Moscou empêtré

Direction la salle du tribunal d’abord où l’annonce du verdict a suscité une certaine agitation : « C’est une honte ! C’est une injustice ! », ont scandé plusieurs personnes pendant que Nadejda Tolokonnikova souriait en apprenant sa condamnation.

A l’extérieur du tribunal, les Pussy Riot pouvaient compter sur le soutien de plusieurs manifestants moscovites dont Garry Kasparov, ancien champion du monde d’échec. Il a été interpellé par la police, en compagnie d’une trentaine d’autres « dissidents ». Garry Kasparov est accusé d’avoir mordu un policier lors de son arrestation. Il encourt cinq années d’emprisonnement dans les camps.

« On peut voir dans de nombreuses vidéos circulant sur Internet que des policiers m’ont interpellé au moment où je parlais à des journalistes et qu’ils m’ont ensuite frappé. De nombreux enregistrements vidéo et photos démentent aussi les accusations portées contre moi par la police, selon laquelle j’ai agressé un policier et l’ai mordu à la main. » (Libération, 20/082012)

L’Occident outré 

Le procès des Pussy Riot a placé la Russie au centre de l’attention mondiale. Surtout en Occident où le verdict est jugé disproportionné. Ainsi, de Berlin à Paris, de Barcelone à Washington, dans toutes les grandes villes d’Europe et des Etats-Unis, des manifestations de soutien aux punkettes se sont formées à la date du procès et dans les jours qui ont suivi.

Le lendemain du verdict, Le Monde, comme l’ensemble des médias occidentaux, revenait sur l’affaire avec de nombreuses critiques :

« Selon l’article 14 de sa Constitution, la Russie est un Etat laïque. Selon son code pénal, le blasphème n’existe pas. Selon les apparences, la justice y est indépendante. […] Pour le maître du Kremlin et son « élite en épaulettes » issue du KGB, l’intention est claire : réveiller les instincts conservateurs et anti-occidentaux de la Russie profonde, qui leur est acquise, pensent-ils. Et faire taire la voix de l’autre Russie, celle de la classe moyenne, prompte à contester les fraudes massives aux élections de l’hiver 2011-2012 et le despotisme mal éclairé du tsar Poutine. […] En outre, à l’énoncé du verdict, un détail révèle la vision paranoïaque du pouvoir russe : la juge a noté que le mari de l’une des accusées était détenteur d’un passeport canadien, sous-entendant l’existence d’un complot mondial contre la Russie. » (Le Monde, 18/08/2012)

La justice russe est au centre des critiques occidentales, elle est accusée d’être impartiale et de soutenir les intérêts du pouvoir en place. Le tribunal qui a condamné les punkettes a subit ce matin une cyberattaque. Son site Internet présentait des images discréditant le système judiciaire russe, une vidéo provocante du chanteur bulgare Azis ainsi qu’une nouvelle chanson des Pussy Riot baptisée « Putin lights up the fires » (Poutine met le feu).

Le soutien avant le procès

En Angleterre, 10.000 personnes avaient signé la pétition d’Amnesty International remise à l’Ambassade de Russie à Londres la veille du procès.

Côté artistes, John Malkovich, Sting et Yoko Ono avaient déjà pris position, tout comme Paul Mc Cartney qui a écrit une lettre de soutien au trois punkettes incarcérées. Mais c’est Madonna qui a fait le plus parler d’elle en affichant sa solidarité envers le groupe punk russe. En concert à Moscou, le 7 août, elle avait appelé à prier pour la libération des Pussy Riot tout en ayant tatoué leur nom dans le dos. Faisant suite au jugement, elle a déclaré sa profonde déception lors d’un concert à Zurich samedi.

« Je proteste contre ce verdict infligeant deux ans de détention aux Pussy Riot pour une performance de 40 secondes exprimant leurs opinions politiques. »

Les politiques de l’Ouest très critiques

Si Madonna a le droit d’exprimer sa déception, c’est surtout la réaction politique des démocraties mondiales qui était attendue. Les seuls à monter au créneau sont les pays occidentaux, preuve que le modèle russe est toujours aussi craint à l’Ouest.

Washington a qualifié le verdict de « disproportionné » et s’est dit « préoccupé » par « l’impact négatif sur la liberté d’expression en Russie ». Paris a également fustigé une sentence « particulièrement disproportionnée », tout comme Londres et Catherine Ashton, chef de la diplomatie de l’Union européenne.

La chancelière allemande Angela Merkel a critiqué une peine de prison « démesurée » qui « n’est pas en harmonie avec les valeurs européennes d’Etat de droit et de démocratie pour lesquelles la Russie s’est prononcée en tant que membre du Conseil de l’Europe ».

Quant à l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), elle a estimé que « les charges de hooliganisme et de haine religieuse ne doivent pas être utilisées pour limiter la liberté d’expression ».

On l’aura bien compris, le monde occidental, nations, médias et opinions publiques réunis, s’est dressé d’une seule et même voix contre la sentence de la justice russe. C’est tout le régime de Poutine qui est aujourd’hui montré du doigt. Finalement, les Pussy Riot ont donc plutôt bien réussi leur coup. Leur condamnation a donné un nouveau souffle à l’opposition, et elles ont sensibilisé l’opinion publique mondiale à la main-mise du régime jusqu’au-poutine. Un régime qui, comme le souligne Le Monde, « vient de se tirer une balle dans le pied ».

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S.L.


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