Patrick Bruel – « Très souvent, je pense à vous… »
C’est d’un fax envoyé par la dame en noir à Patrick Bruel qu’elle terminait par ces magnifiques mots « Très souvent, je pense à vous avec tendresse et force » que le titre de cet hommage à Barbara prend sa source. Ayant dès son plus jeune âge été réceptif aux chansons de cette artiste complète, le Français fut un de ses plus grands fans et nous retranscrit au travers d’un album en forme d’hommage ses plus belles chansons.
Alors oui, on pourrait y voir un nouvel album de reprises pourtant on ressent une véritable passion et une recherche dans l’interprétation de ces 15 titres dont le véritable attrait est le poids des textes toujours autant d’actualité.
L’album démarre un peu doucement sur un « Madame » ampoulé où le piano plein d’une réverbération vintage peine à nous emporter dans la mélodie magnifique de ce titre tout en tendresse. Patrick Bruel se frotte et se pique à une chanson qu’il ne réussit à aucun moment à s’approprier. De la même façon, sur « Drouot », malgré un parti pris très électro, le chanteur se perd dans une composition semblant le dépasser et dont il n’arrive pas à faire oublier l’original.
Théâtralisant avec excès un « Aigle Noir » tubuesque et difficile d’interprétation, il se casse un peu les dents sur ce monument de la chanson française dans lequel Barbara raconte son enfance malheureuse tachée par l’inceste de son père. Patrick Bruel ne parvient pas à transmettre le souffle initial et l’aigle ne fait qu’une bouchée du chanteur qui finit par se perdre dans un arrangement digne de la variété des 90’s.
Heureusement, passés ces 3 titres, le Français semble de plus en plus à son aise. Encore un peu en retrait sur un « Dis quand reviendras tu ? » lisse et sans grande finesse, il faut attendre le magnifique « Ma plus belle histoire d’amour » pour le voir pleinement s’épanouir dans une composition qu’il réussit à rendre vibrante.
Tranchant et martelant un « Perlimpinpin » profond et éminemment d’actualité, Patrick Bruel parvient presque à nous faire oublier la version originale. On est comme happé par ces percussions brutales qui nous piquent de leurs lames aiguisées. Travaillant une électro minimaliste, il met en avant un texte d’une profonde noblesse dénonçant l’extrémisme sous toutes ses formes.
Malgré un démarrage un peu lent et parfois caricatural, Patrick Bruel nous sert un album de reprises extrêmement sincère. Mielleux là où Barbara était tranchante, rond lorsqu’elle était tragique, Patrick Bruel lisse un peu le message et joue parfois sans grande finesse avec des arrangements caricaturaux dont on se lasse vite. Possédant quelques très bonnes surprises à l’electro brutale, l’album tire surtout sa grâce de ces textes emplis d’une poésie tragique et nostalgique d`une enfance perdue. Au travers du Français, c’est Barbara qui est célébrée et qui nous enchante de sa dramaturgie et de son amour des mots, de ces histoires universelles et de ces personnages si attachants qu’elle raconte avec un sens humain profond.
Arnaud Le Tillau
arnaud.letillau@quai-baco.com
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