/// CHRONIQUES
Date d'ajout : 18-11-13

Vincent Delerm – « Les Amants Parallèles »

Voilà 5 ans que Vincent Delerm n’avait rien sorti. Tour à tour acteur au travers du spectacle « Memory » puis photographe, le français nous revient en cette fin d’année avec « Les Amants Parallèles » au concept musical abouti et réussi au travers d’un univers excessivement nostalgique.

C’est dans une sobriété mécanique et rugueuse que s’ouvre cet album. À l’image d’un film, Vincent Delerm nous conte l’histoire d’un couple, d’une histoire d’amour, au travers de morceaux choisis, d’instantanés de vie dont il sait si bien capturer la magie. Passent telle une introduction « L’avion », puis « Le film » et les « Bruits des nuits d’été » aux faux-airs de nostalgie et aux mots choisis à la poésie espiègle.

Puis on écoute « Robes » et c’est comme si tout semblait tourner. La voix douce de Rosemary Standley du groupe Moriarty, le piano s’éteignant puis réapparaissant par grappe nous emportant dans une effluve nostalgique indescriptible. Bribes d’histoires vécues, photographies anciennes, instantanés Polaroïd, le titre résume assez bien à lui tout seul l’état d’esprit de Vincent Delerm mais c’est dans les mots qu’arrive une définition touchante de l’univers du français sur cet album : « rephotographier une image déjà abîmée ».

Car oui, Vincent Delerm se prend pour un photographe, semblant retravailler ses souvenirs pour en faire des poèmes aux relents d’enfance d’où émanent une douce mélancolie. Agrémentant son livret, pochette noir et blanche à l’esthétique sobre et pudique, de photographies qu’il a réalisé lui-même, on ressent une véritable sérénité, une volonté de se poser, de ne plus être en mouvement mais seulement d’apprécier. Le français se retourne donc vers cette nostalgie sépia très cinématographique.

Vincent Delerm se pose en narrateur de cette histoire glissant doucement vers un mélange de parlé et de chanté ne se permettant pas ou peu de fioritures très Matthieu Boogaerts dans l’approche. Certaines fois chuchotés et murmurés, les textes sont profonds et parfois bouleversants (il suffit d’écouter le magnifique « Ils avaient fais les valises dans la nuit » sublimant les rapports parents-enfant dans ce qu’ils ont de plus beau et dans ces petits rien qui font un grand tout) font écho à cette vie d’adulte complexe et passionnante.

Pour la première fois dans sa carrière, l’artiste mêle tous ses centres d’intérêts les reliant au travers d’un album splendide. « Les Amants Parallèles » transpire dans l’ordre le cinéma au travers des textes, la photographie dans cette façon de capturer l’instant et une musicalité sans faille avec cette volonté de transcender le genre et de s’imposer une contrainte forte en y insufflant un son rude et poétique. En effet, la prouesse aura été de réaliser chaque note et chaque son au piano.

Vincent Delerm tel l’artisan, construit des musiques avec ses mains à mille lieux d’un conformisme ou d’une standardisation qui est maintenant la règle. Il se pose avec cet album en leader d’une génération souhaitant découvrir de nouveaux horizons et mêlant plusieurs disciplines dans un tout touchant à l’émotion palpable. Ciselé en terme d’écriture, l’artiste qui semblait tourner en rond avec son dernier album nous revient plus novateur que jamais au travers de ces « Amants Parallèles » à la fois protéiforme et simple. Un chef d’œuvre.

Arnaud Le Tillau
arnaud.letillau@quai-baco.com

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