Après un premier EP confidentiel sorti en 2014, Sophie Le Cam remet le couvert avec un nouvel EP intitulé « Veuillez Croire » . Dans un univers surréaliste, absurde et touchant, la jeune française dessine des compositions à la fois fines et humoristiques qui nous font virer du rire au larme. Jouant sur une musique rétro sixties, Sophie Le Cam nous offre un EP complexe et populaire qu’elle supplante de son faux air de Renaud dans un tout fantasque et pince sans rire plein d’audace.

Improbable sur la mini composition « Tout les Michel » , sorte de mélange entre une pop 70’s et une musette, Sophie Le Cam pose de suite le décor de son univers à part. Rappelant à l’excès Renaud sur « La Louze » , Sophie Le Cam dessine un personnage de looser avec un accent parisien. Jouant de son ressort comique elle transforme une chanson française en une sorte de chanson à boire qui nous fait sourire par son audace et son sens du border line. Accrochant une misère intellectuelle à son personnage elle touche du doigt une précarité réelle et malheureusement commune. Sophie Le Cam réussit au travers de ses chanson qui se veulent humoristique à dessiner et à croquer un peuple perdu et subissant une société toujours plus clivante. 

Capable d’esquisser en un tour de main les habitudes de la classe moyenne des banlieues dans un mélange de tendresse et d’angoisse, Sophie Le Cam  nous glace de sa lucidité. Sous ses jeux de mots et ses rimes parfois grossières se cache une analyse froide de la banlieue, de son rythme , de ses habitudes qui sous sa plume deviennent gluants et nauséabonds.  Audacieuse dans ses choix, sublime dans le très dutronnesque « Sujet Limite » ou dans le gouailleur « Lulu » Sophie Le Cam dessine la nouvelle banlieue avec une précision tranchante dans un écrin à la drôlerie sous jacente.

La claque on se la prend finalement sur un titre comme « Margaux » . Dédiée à sa nièce ce titre est un bijou de tendresse au vocabulaire fleuri. Elle nous impressionne d’un texte ciselé et brillant qu’elle agrémente d’une instrumentation à la sobriété frissonnante. De la même façon sur « Deauville-Paris » , elle dessine une chanson d’amour en creux qui nous fait frissonner. On redécouvre cette façon que l’on a de se faire une raison lorsqu’un amour est perdu. Sophie Le Cam nous ouvre grand son cœur et couve derrière des chansons badines un univers où l’enfance et l’adolescence se confondent dans un tout magnifique.

Sophie Le Cam est folle, de cette folie éblouissante permettant toutes les audaces. Folle de se mettre autant en difficulté dans des titres aussi bien humoristiques que puissamment inventifs. D’une sincérité rare la jeune femme ouvre son cœur dans un album excessivement touchant aux titres à la fois gamins et absolument adulte. A première vue cette tête encagoulée nous fait rire sur la pochette, après l’écoute de l’EP on se demande si finalement elle ne pleure pas cette fille au regard touchant. Truculente dans cet habit de folle à liée, Sophie Le Cam dessine sa légende dans une pop chansonnière. Bluffant !

Arnaud Le Tillau
arnaud.letillau@quai-baco.com