Renaud – « Renaud »
On y croyait plus et pourtant c’est bien Renaud qui après quelques années d’errance nous revient tel un ressuscité. Intitulant son album sobrement « Renaud », il imprime à cet opus une sorte de renaissance inimaginable il y a encore quelques mois. Passé le plaisir de retrouver cet univers entre enfance et fragilité, on découvre des compositions hétérogènes à l’image des deux facettes du personnage.
Démarrant avec peine de sa voix perdue et granuleuse sur un « J’ai embrassé un flic » relatant les événements du 11 janvier à grand renfort d’image d’Epinal, on pense tout d’abord que le Renaud que l’on connaissait a totalement déserté depuis « Boucan d’enfer ». Cela est d’ailleurs confirmé sur « Hyper Casher » lente et pathos. Dans une composition mêlant bons sentiments et argot parisien sur un fond sonore à l’accordéon dégoulinant, il ne semble être que l’ombre de lui même.
Faisant l’apologie en demi teinte des policiers sur le récit d’un repenti « La nuit en taule », il dessine une nouvelle facette à son personnage, sorte de grand père fatigué au bilan impressionnant. Se racontant dans chacun de ses titres il trouve dans son malheur et sa vie chaotique nombre de sujet qu’il traite avec beaucoup d’humilité. Toujours incisif dans cette écriture mêlant enfance perdue et vie d’adulte chaotique, le Français réussit à nous toucher.
Tel le Phénix, Renaud semble renaître de ses cendres. Perdant quelques plumes au passage, l’artiste dessine sur le single « Toujours Debout » une société complexe et désenchantée dans laquelle il semble survivre. Se raccrochant à quelques fondamentaux, il apparaît comme un grand père rebelle au grand cœur. Égérie d’une génération et d’une certaine façon de vivre, Renaud retrouve dans cet album le plaisir de chanter.
Mais il n’est j’aimais aussi bon que lorsqu’il parle de l’enfance. On le voit très bien sur « Héloïse » en forme de lettre d’amour à sa petite fille ou sur « Bonhomme » dédié à Malone. Renaud prend cette fois ci sa plus belle écriture pour nous faire vivre avec émotion le lien entre ce père et ses enfants. Renaud est à l’image de cette société transformée, il apparaît changé et bousculé par cette nouvelle approche.
Le Docteur Renaud, Mister Renard des années 2000 n’a pas totalement disparu. Au travers d’une pop rock lissée dans laquelle il réussit à intégrer une vision assez réelle de son état, on retrouve avec plaisir mêlé d’un soupçon de gène ce langage entre argot, vulgarité et bons mots qui est le fondement même de l’œuvre du parisien. Renaud est à l’image de cette vie faite de hauts et de bas, de grandes réussites et de gros ratages. Ce nouvel album ne fait pas exception proposant des titres magiques et d’autres moins inspirés. Pourtant, Il parvient avec panache à nous faire oublier ses coups de mous en puisant dans sa vie le terreau de ces textes attachants et vigoureux.
Arnaud Le Tillau
arnaud.letillau@quai-baco.com
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