/// CHRONIQUES
Date d'ajout : 26-02-13

Kavinsky – « Outrun »

Chronique Kavinsky - Quai Baco
Kavinsky est un imposteur. Certes, c’est une accroche un peu provocatrice, mais pas loin d’être vraie. On peut relativiser en affirmant que « Outrun », son nouvel album, est une imposture de génie, mais quand même…

Loin de moi l’idée de vouloir aller à contre-courant de la vague d’enthousiasme provoquée par la sortie de « Outrun », mais force est de constater que Kavinsky se moque un peu de nous.

Sur les 13 titres qu’il nous propose, on retrouve pas moins de 7 titres déjà connus à travers les différents EP sortis depuis 2006, des titres entendus sur bon nombre de publicités (« Odd Look », « Roadgame ») et bien sûr l’incontournable « Nightcall » rendu mondialement célèbre par le film « Drive ».

Mais passons sur l’aspect « Best of », car le moins que l’on puisse dire, c’est que ces titres composés sur plusieurs années ne manquent pas de cohérence. On roule à 200 kms/heure aux côtés de Kavinsky, avec dans l’autoradio de la grosse électro huilée, puissante et gonflée de testostérone, mais avec l’étrange sensation de tourner en rond sur le périph. On se revoit 20 ans plus tôt, découvrant Daft Punk qui inventait un style et un son jamais entendu. Kavinsky s’est fortement inspiré de ses aînés jusque dans la gestion de l’image et du marketing qu’il maîtrise à merveille.

Kavinsky "Outrun" - Quai BacoIl est vrai que musicalement, il reprend à son compte les (bonnes) ficelles des deux idiots punks : gros son, basses énormes, grosse caisse sur tous les temps, arpeggios synthétiques basés sur une jolie boucle de 4 accords… Tout y est, la surprise et l’innovation en moins. C’est d’ailleurs ce qui fait que ce « Outrun » n’est pas désagréable à l’écoute : on est en terrain archi-connu et rassurant.

« Rampage », « Odd Look » et « Roadgame » sont des titres ultra-efficaces et immédiatement percutants. Ce n’est pas pour rien qu’ils illustrent de grosses berlines dans des spots de pub. Côté arrangements, chaque mesure baigne dans cette ambiance 80’s pour nostalgique de la Megadrive de Sega (l’intro de « Deadcruiser »), le tout rempli de samples et plans de guitar hero au kilomètre (« Blizzard », « First Blood »), tellement kitschs que ça en devient « in » voir sympathique. Dommage que Justice ait déjà bien exploité le filon.

Bien sûr Kavinsky varie parfois les plaisirs et nous propose par exemple une voix hip-hop sur « Suburbia », mais l’écran de fumée ne dure qu’un temps. Il nous recycle des recettes qui ont fait leurs preuves, passant sans vergogne de Daft Punk à Air ou Mr. Oizo. Par exemple « Endless » hésite entre la BO de Tron et le « Sexual Sportswear » du pote Sébastien Tellier. « Blizzard » et son equaliseur coupe-bas qui tourne, ou « Roadgame » avec son passage calme, puis doublement de tempo, nous montre la profonde inspiration musicale de Vincent Belorgey alias Kavinsky… Bien sûr, ça fonctionne, et parfois même incroyablement bien comme le prouve « Nightcall », tube en puissance comme on en fait rarement, mais on se demande si la co-signature systématique des titres avec Paul Hahn (manager des Daft Punk), Guy-Manuel de Homem Christo, et surtout l’excellent SebastiAn ne suffit pas à expliquer les quelques bonnes choses de cet album. Car soyons sérieux : on est ici davantage face à une accumulation de gentils titres électro ultra-marketés pour pubs de voiture qu’à un véritable nouvel album intéressant et innovant.

Il faut le reconnaître, Kavinsky sait s’entourer et maîtrise le marketing et la communication, mais en piochant à droite à gauche, il nous livre un « Outrun » qui donne l’impression d’une bonne grosse blague très bien ficelée et qui peut faire illusion pour peu que l’on ne se penche pas trop dessus. Mais les meilleures blagues sont toujours les plus courtes.

Marty Tobin
marty.tobin@quai-baco.com


Copyright : Quai Baco Stimuli - Mentions légales - S'abonner - Contact Pro - contact@quai-baco.com - Quai Baco Production