Les compilations faites de reprises sont toujours un exercice difficile, et encore plus quand il s’agit de Georges Brassens… Emile Omar, programmateur sur Radio Nova, nous propose « Echos d’aujourd’hui », un album regroupant des titres du célèbre moustachu. La particularité de cet album, c’est d’avoir fait appel à des artistes internationaux d’horizons très différents, et interprétant les tubes de Brassens dans leurs langues natales. Au-delà d’un simple hommage, cet album est avant-tout une belle réussite musicale polyculturelle.

Difficile de faire mieux en terme de métissage musicale : on passe du chant mongole de Enkh Jargal, aux instruments congolais des frères Makouaya, en passant par l’électro-jazz de Nostalgia 77. Et pourtant on est loin de l’exercice de style sans âme, écueil fréquent dans ce genre de compilation. Yael Naim joue à la perfection la carte de la mélancolie sur « Hasafsal hatsiburi » (Les amoureux des bancs publics) et son bel arrangement tout en douceur, tandis que Night Works (projet solo de Gabriel Stebbing, ex-Metronomy) nous livre une très bonne version electro-pop sympa de « P… de toi » (« The fool »).

Le voyage continue avec Enkh Jargal & Duplessy qui interprètent « Le roi » (« Eneg Haan »). Une voix puissante et rocailleuse, des paroles en mongole, quelques percussions un violoncelle suffisent à nous embarquer. Comme souvent sur l’album, on oublie rapidement la chanson originale et on se laisse doucement porter d’un continent à l’autre. Que ce soit « Friends like evergreens » (« Au bois de mon coeur ») avec la voix envoutante et pleine de soul de l’anglaise Lianne La Havas, ou l’hypnotique « Testaman » de l’haitien Racine Mapou de Azor, ces versions possèdent chacune leur âme propre, ne cherchant jamais à copier l’original.

Mais, rassurez-vous, on est bien loin d’une compilation exotique façon Béatrice Ardisson. Ici les protagonistes livrent des versions sans artifice et souvent dépouillées, mais toujours musicalement impeccable. Sur « Je me suis fait tout petit » des jumelles Caronni (d’origine argentine), le duo contrebasse/clarinette fonctionne à merveille et la relecture sud-américaine pleine de percussions de « Jeanne » par Grupo Canalon de Timbiqui est envoutante.

On pourrait encore citer « Westances » par Shawn Lee, dans une excellente version trip-hop downtempo gainsbourienne ou encore les franco-suédois de Herman Düne qui, fidèles à leur folk inimitable, saupoudrent « Dans l’eau de la claire fontaine » («In the clearwater spring») de voix delayées et de choeurs minimalistes.

En plus d’être un hommage réussi à Georges Brassens, « Echos d’aujourd’hui » est surtout un grand voyage musicale où chaque étape est une belle surprise. On ne peut qu’applaudir le casting de luxe et la direction artistique de cet album qui va bien au-delà de la simple compilation pour fan. Gageons que même les plus récalcitrants à ce bon vieux Georges y trouveront leur compte.

Marty Tobin
marty.tobin@quai-baco.com