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Date d'ajout : 26-03-13

Arman Méliès – « IV »

Chronique Arman Melies - Quai Baco
On a retrouvé Arman Méliès. Il se cachait dans l’ombre de Julien Doré et Hubert-Félix Thiéfaine ou expérimentait dans son coin, nous préparant « IV », un album très différent de ce qu’on avait pu entendre de sa part jusque-là. Et l’attente en valait la peine.

« IV » est marqué par un parti-pris musical évident : l’omniprésence des synthétiseurs au détriment des guitares auxquelles Arman Méliès nous avait habitué. Le pari est risqué à l’heure où le revival de la new-wave 80’s bat son plein, mais le défi est relevé avec brio.

« L’art perdu du secret », premier titre de l’album, marque cette transition avec un bel arpège de guitare acoustique qui laisse la place aux sonorités plus électroniques. Et quand les gros arpeggios synthétiques font leur entrée, le moins que l’ont puisse dire, c’est que ça claque. La voix d’Arman Méliès n’est pas en reste, avec un doublage toujours fin et efficace très présent tout le long de l’album, mettant en valeur la lancinante mélodie de ce titre d’ouverture impeccable.

Arman Meliès - Quai BacoMélodiquement, c’est d’ailleurs une impression récurrente tout au long de « IV » : les lignes vocales confèrent une agréable sensation hypnotique et parfois mélancolique loin des standards pop habituels, et ça marche plutôt bien. On se laisse lentement happer par les paysages sonores électroniques que tisse Arman Méliès, comme sur « Pompeï » (co-écrit avec Julien Doré) au chant légèrement monotone et à la rythmique déstructurée intéressante. Rien ne saute véritablement à l’oreille, mais AM parvient à nous emmener exactement là où il veut, et ce n’est pas si fréquent. Certains trouveront sans doute les arrangements un brin prétentieux ou « bobo », là où d’autres y verront de la minutie et le la finesse, qu’importe : « IV » sait s’affranchir des formats trop communs et se permet le luxe de ne pas mettre systématiquement un refrain, de faire de l’instrumental (le superbe « Fern Insel »), ou de proposer des titres de 10 minutes, comme le sublime et inquiétant « Silvaplana », sans doute un des meilleurs moments de l’album.

Dans ce titre, Arman Méliès prend le temps d’installer un climat et propose différentes parties alternant mélodie sombre et simple sur un 3 temps électroniques, et passages instrumentaux à la manière du « On the run » de Pink Floyd. Et on ne voit pas le temps passer. « Arlésienne » est du même niveau, avec sa mélodie tournante et sans cesse évoluante. On constate que c’est quand il va le plus loin dans ses expérimentations instrumentales qu’Arman Méliès nous embarque à coup sûr.

Les titres plus communs comme « Dans la cendrée » ou « Rose poussière » sont certes toujours efficaces mais moins percutants, et on frôle parfois de trop prêt la variété de Daho ou Jacno. Mais la plupart des titres parviennent tout de même à échapper au piège lescopien : en effet, Jan Fiévé alias Arman Méliès parvient toujours à nous attirer dans ses filets avec des textes sombres, atypiques et de petites trouvailles qui font mouche. Les quelques dissonances magiques du single « Mon plus bel incendie » ou encore les passages instrumentaux de « Pompeï » ou « Des vitrines » sont autant de bonnes idées qui forment un tout cohérent et addictif.

« Mes chers amis » conclut sous forme de clin d’oeil cette épopée synthétique. Initialement utilisé sur le web avec pour toute parole le discours d’investiture de Nicolas Sarkozy, ce morceau prouve qu’il tient également bien la route en version instrumentale et démontre, si on avait encore besoin de preuves, qu’Arman Méliès maîtrise son sujet quand il s’agit d’utiliser intelligemment les machines de studio.

A l’écoute de « IV », on se sent petit moucheron irrésistiblement attiré par la lumière, comme hypnotisé par une force invisible. Arman Méliès prend le temps d’instaurer un climat unique à cet album, ambiance renforcée par l’omniprésence des sons synthétiques. Un album hypnotique et hors-norme dans lequel on se laisse emporter avec plaisir.

Marty Tobin
marty.tobin@quai-baco.com


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