/// CHRONIQUES
Date d'ajout : 18-04-13

Les Têtes Raides – « Corps de mots »

Chronique Tetes Raides - Quai Baco
Faisant suite à une série de concerts aux Bouffes Du Nord, ce nouvel album des Têtes Raides compile en musique une série de poèmes. Passant de Raimbaud à Artaud ou de Prévert à Genêt, le groupe impressionne de part son aisance et son énergie.

Quoi de meilleur que de commencer une compilation de poèmes par un de leur chef de file. C’est effectivement par « Le cheval rouge » de Prévert que commence cet opus. Christian Olivier de sa voix grave et profonde donne de suite le ton.

Puis démarre la machine Têtes Raides, mal ajustée, claudiquante, clinquante et rutilante, on retrouve cet arrangement entre fanfare et cirque, à la fois joyeux et nostalgique. Au travers de la voix grave de Christian, les mots prennent de suite forme. Enchainant sur un même thème entraînant et festif, 2 poèmes se répondant (« Corps de Cri » écrit pour l’occasion et « Corps de langouste » texte absurde et génial de Dubillard), les Têtes Raides impressionnent de leur audace, se permettant de jouer de la plus belle manière qui soit avec ces textes sans les dénaturer. De la même façon leur interprétation du poème « Les Corbeaux » de Raimbaud nous laisse pantois. En un mot : superbe !

Nous faisant parfois penser à Ferré sur « Avec moi dieu le chien » d’Artaud dans une interprétation juste et complète, les Têtes Raides nous éblouissent de part leur facilité à s’approprier les textes nous faisant rapidement oublier l’origine de chaque poème.

Tetes Raides "Corps de mots" - Quai BacoEntre chanson et slam, les Têtes Raides montent petit à petit la puissance de leur interprétation. Ainsi « L’ephemeride », titre beaucoup plus rock, composé pour l’occasion qui n’a pas à rougir du reste de l’album et « La neige » nous préparent au point d’orgue de cet album en la présence du « Comdamné à mort » de Jean Genet.

Lourd et impressionnant, ce titre semble pour beaucoup excessivement difficile à interpréter (pour preuve la version ennuyeuse de Daho et Jeanne Moreau), tellement les mots de Genet sont bruts et rudes. Pourtant les Têtes Raides s’en sortent sans coup férir et de la plus belle manière qui soit. Sur un arrangement entre accordéon et cordes, le groupe parvient à transcender le texte. On est ébahis et l’on écoute de bout en bout, hypnotisé que l’on est par la voix de Christian Olivier. Ces 20 minutes de déclaration d’amour au condamné à mort Maurice Pilorge semblent, dans la bouche du malien de naissance, ne durer qu’un instant.

Difficile de redescendre suite à cette performance, pourtant c’est avec plusieurs textes courts de Philippe Soupault, que les Têtes Raides nous remettent les pieds sur terre.

Deux textes de Desnos plus tard arrive le titre emblématique du groupe « Ginette » revisité (pas assez à mon goût) puis c’est au tour du « Pont Mirabeau » d’Apollinaire de fermer la marche.

On ressort de cet opus chamboulé et impressionné. Les Têtes Raides retrouvent au travers de ces textes l’ardeur qu’ils avaient un peu perdu sur les précédents opus et nous prouvent une nouvelle fois que plus qu’un groupe, ils restent une véritable référence dans la chanson française.

Arnaud Le Tillau
arnaud.letillau@quai-baco.com


Copyright : Quai Baco Stimuli - Mentions légales - S'abonner - Contact Pro - contact@quai-baco.com - Quai Baco Production