3 ans après le décevant « 7 », Zazie revient sur le devant de la scène avec « Cyclo », un nouvel album sombre aux influences électro. Une prise de risque gagnante car c’est sans doute ce que qu’elle a fait de mieux depuis de nombreuses années.

A la réalisation, c’est Olivier Coursier du groupe Aaron qui s’y colle. Une première collaboration qui n’est dans doute pas pour rien dans le vent de fraîcheur qui souffle sur cet album. Ici, peu de superflu, Zazie va à l’essentiel. Les arrangements sont minimalistes et pensés avec minutie. Les compositions tournent souvent autour d’une boîte à rythme sobre et d’un piano, pour ensuite s’enrichir de différents éléments électroniques.

« Je ne sais pas » s’ouvre comme une ballade piano classique, puis monte lentement en puissance avec des arpèges synthétiques et nappes du plus bel effet. On ressent la tension permanente qui se dégage du texte et de la voix de Zazie, qui nous tient en haleine jusqu’au bout. Le calme de « Si tu viens », avec ses voix démultipliées, nous rappelle plus les anglais d’Archive que la variété consensuelle de Marc Lavoine, et c’est tant mieux.

Bien sûr la chanson française est toujours présente  on pense par exemple aux belles mélodies de Maxime Leforestier sur « Mademoiselle », mais passé à la moulinette 2013. « Vienne la nuit » n’hésite pas à s’étirer sur plus de 6 minutes, et la douce mélodie est uniquement accompagnée de nappes, boucles synthétiques et choeurs millimétrés. On reste scotché à cette lente montée hypnotique et sombre. Une impression récurrente au fil de cet album où Zazie déroule des textes ciselés autour de thématiques qu’elle affectionne, comme les relations homme/femme ou bien encore la société de consommation (« Tout »), mais sous un angle plus intimiste et désabusé qu’à l’accoutumé.

Un léger pessimisme ambiant qui musicalement se traduit par des mélodies nonchalantes et des arrangements sombres comme sur le bon single « Les contraires », qui commence avec une simple grosse caisse de synthèse et quelques accords plaqués. On est très loin du refrain de variété facile cher à la chanson française et Zazie s’engage dans une voie qu’elle n’avait fait qu’effleuré auparavant. Certes, certains titres comme « 20 ans » ou « Mobile Homme » prennent moins de risque et sont plus anecdotiques, mais d’autres ressortent clairement du lot.

« Cyclo », sur un texte tout en introspection, monte lentement sur sa boucle électronique pour ne démarrer qu’après plus de 3 minutes. De même, « Vienne la nuit », un des meilleurs titres de l’album, profite des 6 minutes qui lui sont accordées pour étirer lentement sa jungle électronique et dérouler son excellente mélodie. Vraiment bien joué. On en vient à regretter que certains titres encore un peu lisses ou froids n’aillent pas aussi loin, mais d’une manière générale, ce « Cyclo » met décidément la barre très haute.

Avec ce nouvel album, Zazie s’éloigne encore un peu plus de la grande famille de la variété. « Cyclo » prend le risque de sortir des sentiers battus français en nous livrant des titres sombres aux sonorités électroniques très présentes. C’est bien fait, intense et mélodique tout en restant sobre. Si tous les albums de chanson française pouvaient être de ce niveau, on signe tout de suite.

Marty Tobin
marty.tobin@quai-baco.com