Archimède – « Arcadie »
C’est en 2011 au travers de leur deuxième album studio « Trafalgar » que le grand public découvrait Archimède, duo formé par les frères Boisnard originaires de Mayenne. Assumant leur rock français, les frangins réalisaient un album en forme de transition entre le rock Oasis des débuts et cette pop astucieuse qu’ils nous proposent sur leur très bon nouvel album. Naviguant entre rock mélodique et pop nuancée, « Arcadie » signe un virage musical parfaitement contrôlé.
On a d’ailleurs peine à reconnaître Archimède à l’écoute de ce premier titre « Allons enfants ». Où sont passés les jeunes rockeurs au sons très proche d’Oasis? Voix beaucoup plus travaillée, débit à la Bertrand Cantat sur « L’homme pressé », les Mayennais nous servent un premier titre vitaminé aux arrangements lorgnant du côté d’un électro rock encore absent de leur palette musicale. Énergiques sans être une seule fois lassants, les Français nous emportent dans un refrain porteur et vite entêtant.
Car si les arrangements changent, ils gagnent en profondeur grâce à leur collaboration avec le groupe A.L.B.E.R.T. ayant déjà travaillé avec Souchon ou Beck. Passant du math rock sur « Oh Viens ma chérie » au folk intimiste de « Dis le nous », le duo réussit à rendre le tout cohérent grâce à une science impressionnante de la mélodie. À l’image de « Julia », premier single de cet album, les titres coulent de source et nous emportent vite.
Côté textes, les frères Boisnard semblent une fois de plus avoir progressé. Absolument pas pédante ou grandiloquente, l’écriture des français est abordable sans être bon marché. Fine et ciselée, elle trouve tout son sens dans une époque ou les clivages et les extrêmes font bonne impression. Pudique au travers d’un texte sur l’homosexualité « Dis le nous » ou profond sur le bouleversant dernier titre « Le grand jour » qui aurait pour le coup mérité un peu de nuance, les français mêlent énergie et émotion rappelant beaucoup la variété rock québécoise.
Archimède réussit à construire des titres à la naïveté en trompe-l’œil aux mélodies colorées et joyeuses. Ainsi, « Toi qui peines au bureau » rappelle beaucoup Souchon avec un texte faussement candide, ciselé, à l’humour féroce, qui tape dans le mille sur la thématique de l’injustice. De la même façon, raillant avec classe les groupes baragouinant des chansons en anglais, le duo nous amuse sur le rafraîchissant « Ça Fly Away ».
« Quand les frères s’associent les montagnes se changent en or », faut-il croire ce proverbe chinois? Toujours est-il qu' »Arcadie » signe le retour en fanfare du duo Mayennais. Mature et profonde sans être une seule fois plombante, la musique des français nous emporte dans un univers simple cultivant une originalité rare. Ces jeunes ont un talent fou qui ne fait que s’épanouir au fur et à mesure de leur productions toujours plus précises et impressionnantes. Archimède à su creuser son sillon et proposer un style franc, sans manière aux textes ciselés.
Arnaud Le Tillau
arnaud.letillau@quai-baco.com
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