/// CHRONIQUES
Date d'ajout : 14-10-13

La Maison Tellier – « Beauté pour tous »

Groupe originaire de Rouen, La Maison Tellier (en référence à une nouvelle de Maupassant) nous délivre en ce milieu du mois d’octobre un 4eme album au folk-blues-rock éclatant. Rugueuse et brutale, la musique des français recèle de véritables perles et un sens de l’arrangement orchestral inné.

Démarrant sur le titre « Sur un Volcan » africanisant et dynamique à souhait, La Maison Tellier soigne son entrée en matière. Rappelant -M- dans ces rythmes entraînants et répétitifs à la mélodie s’insinuant vite en tête, les français s’inscrivent une fois de plus dans une musique de variété de très grande qualité.

Il y a chez les normands cette façon de réaliser des titres simples dans un écrin un peu grandiloquent et porteur comme sur « Un bon Français » au texte ciselé et provocateur. Éminemment pop et très soignés en terme d’arrangements, La Maison Tellier au travers de la voix puissante et envoûtante de son leader impose un style brut et sans fard que l’on n’est plus habitué à entendre.

En effet, que cela soit sur « La fortune, l’honneur, les femmes » ou « Mauvais coton », l’univers très cinématographique des normands nous emporte dans un tourbillon orchestral des plus réussi portant parfois presque à la surenchère voire à l’excès mais toujours impressionnant. La gravité de la voix, la puissance des arrangements, tout concours à rendre le moment exceptionnel.

Travaillant beaucoup sur le thème orchestral du western « Prison D’Eden » ou « La maison de nos pères », on est comme aspiré par l’aura de cette voix mêlée à ces arrangements hors normes. Parfois proche d’un rock revendicatif très Noir Désir sur « Les beaux quartiers », c’est sur un titre comme « Petit lapin« que les normands semblent être au sommet d’un art musical aux contours nets et découpés. En effet, très Léo Ferré dans une approche violente et déstructurée, peuplé d’un arrangement mouvant, bordélique, puissant et presque insaisissable, le titre est à lui seul à une expérience rugueuse et addictive.

Dépoussiérant une variété française un peu standardisée, les français réhabilitent via « Love Boat » une approche brutale et sans fioriture de la composition musicale rejoignant en cela les Sardou et autres Cabrel des débuts. Il y’a chez la Maison Tellier ce qui manque à beaucoup d’artistes français actuels, cette assurance et cette décomplexion textuelle. La Maison Tellier apporte ses propres mots et ses images dans un art consommé du conte nous réconciliant au passage avec une chanson française d’abord très simple.

Chaleureux, habité et entier ce nouvel album de La Maison Tellier nous apporte un véritable bol d’air, prouvant par la même qu’il n’y a pas que les québécois qui réussissent une folk-rock francophone de très bonne qualité. Variété assumée et travaillée, les français nous font aimer la langue de Molière sans nous écraser dans un déluge de rimes plus complexes les unes que les autres. Abouti musicalement et détonnant dans un paysage de musique française un peu terne, les normands se font plaisir et nous offrent un « Beauté pour tous » humain et puissant!

Arnaud Le Tillau
arnaud.letillau@quai-baco.com


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