Damien Saez – « Miami »
On ne reviendra pas sur la polémique entourant la campagne d’affichage de « Miami », le nouvel album de Damien Saez. Il ne faut pas oublier que derrière une photo qui fait scandale, se cachent 10 chansons et un album-concept, sans doute pas le meilleur, mais qui recèle quelques bonnes surprises.
Si l’on devait grossièrement résumer la thématique de « Miami », ce serait drogues et addictions, pouvoir, prostitution… Vous l’aurez compris, beaucoup de fun au programme. Plus sérieusement, ce nouvel album est donc assez sombre et ça se ressent musicalement. On est très loin de la grosse production ciselée du triple album « Messina », sorti il y a tout juste 7 mois. On ressent dans ce nouvel album un sentiment d’urgence qui se traduit par un son très brut et rock très appréciable, proche de ce que Saez avait déjà pu faire avec « J’accuse ».
Tel un accro à la drogue, « Miami » s’articule autour de plusieurs phases : l’avant, le pendant avec ses paillettes et la vision tronquée du monde, et la descente synonyme de retour à la réalité. « Pour y voir » et son accord unique ouvre doucement le bal, mais c’est réellement « Les infidèles » qui lance les hostilités avec du rock puissant et des breaks de batterie survitaminés. C’est un peu sans surprise, mais mélodique et très efficace dans la lignée de ce que Saez a pu faire de plus rock.
« Rochechouart » est beaucoup plus étonnant, et passer l’effet de surprise, on suit Saez dans l’ambiance un peu glauque des fins de nuit (ou petits matins, c’est selon) entre la place Clichy et Pigalle. Etonnamment, l’arrangement n’est pas si sombre et l’on pense même par moment à la Mano Negra dans la manière de doubler la voix lead.
Les titres suivants décrivent non sans ironie les dérives de la drogue et des projecteurs. Avec « Miami » on retrouve le flow immédiatement reconnaissable de Saez avec un refrain sous forme de gimmick entêtant et des paroles cyniques. La fin du titre et ses « nanana » sur rythmique électro-club met en exergue la superficialité des strasses et paillettes de ce type de ville tout en apparence.
De même, « Le roi » est une allusion appuyée et ironique sur la soif de pouvoir qui n’est pas sans rappeler « L’homme pressé » de Noir Désir. Arrêtons là la comparaison, c’est un autre débat… Musicalement, c’est toujours aussi musclé avec un bon gros riff, mais on est ni étonné, ni surpris outre-mesure, et c’est peut-être le défaut majeur de cet album. Cette impression se confirme avec « Des drogues », dont je vous épargne l’explication de texte, et qui malgré un bon refrain, s’étire un peu trop en longueur jusque à en perdre de son impact.
Arrive « Cadillac noire », la grosse erreur de parcours de ce disque qu’on espère être une parodie tant le texte au parallèle sexe/voiture à pu déjà être usé jusqu’à la corde. Ajouter à cela le riff bluesy à la wha-wha et on frôle le Johnny Hallyday, heureusement la montée finale est efficace et fait oublier (un peu) le reste.
La descente s’amorce avec « Rottweiler », titre acoustique monotone et monocorde un peu laborieux, mais c’est surtout « No more », seul titre en anglais, qui marque cette fin d’album. Un beau titre désabusé à la mélodie limpide où notre héros déchu, arrive en bout de course. « Que sont-elles devenues » ferme l’album de manière nostalgique et agréable sans pour autant être impérissable.
Finalement « Miami » est un bon album de Saez, mais avec trop peu de surprises pour nous emballer réellement. Les thèmes abordés et la manière de les traiter ne sont plus très nouveaux dans la bouche du savoyard, et les arrangements rock, bien que de belle facture, laisse un goût de déjà-vu. Reste tout de même quelques bons titres comme « Miami », « Les infidèles » ou « Rochechouart » qui sortent clairement du lot.
Saez nous abreuve de nouveautés depuis 2008, et on se demande si nous aussi, on ne serait pas inconsciemment au bord de l’overdose. Un peu de temps pour un nouveau départ tout frais de la part de Saez, voilà ce qu’on peut souhaiter de mieux.
Marty Tobin
marty.tobin@quai-baco.com
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