Après 4 années sous le nom de Wicked a égrener un rock en anglais dans le texte, le trio décide de se lancer en français. C’est donc sous le nom de Cancre qu’ils nous reviennent au travers d’un EP intitulé « Etrangler ». Inspiré par la prose de l’arrière grand oncle des 2 frères du trio, Marcel Millasseau poilu de la grande guerre, ce nouvel EP se dresse en garant d’un rock à la française. Dans des textes forts et vivants, Cancre met en musique une guerre des tranchées vécue de l’intérieur. 

Dès les premières notes du titre éponyme « Etrangler » on retrouve avec bonheur une production très dense pour cet EP.  De sa voix brute et posée, Cleyt nous fait retrouver les montagnes russes d’un rock français des années 2000. Dans une prose en noir et blanc, le trio dessine un rock orchestral du plus bel effet qui nous entraine dans l’univers à la complexité névrosé de Cancre. Sur le fil, ils nous transmettent dans cet EP une sorte de puissance rock au background immersif et mélodique à souhait. On se laisse entrainer dans l’univers généreux et tranchant d’un trio au rock précis. En français dans le texte, ils nous proposent un rock des années 2000 au émotions fortes.

Mélangeant prose poétique pensée dans l’enfer des tranchées et rock saturé composé en temps de paix, Cancre réussit à donner un nouveau cadre à ces écrits. Puisant dans le verbe griffé du poilu, les français trouvent la musique idoine pour envelopper ce témoignage d’un autre temps. Dans une musique sombre et inquiétante, le trio met toute sa création au service d’une ambiance enfumée et distordue qui fonctionne à merveille. On se laisse surprendre sur « La tête au ciel » par ces sonorités à la rudesse coupante qui multiplient les dissonances pour mieux construire un background proche de l’indus

Coachés par Eric Digaire (Matmatah), Cancre trouve le bon ton et les bonnes sonorités pour mieux nous mettre la tête dans cette boue guerrière. On retrouve une sorte d’urgence rock mais en mode rock français. On pense forcément à Matmatah, Bashung ou Noir Désir dans ces mélodies écorchées et ces expérimentations parfois à la limite de l’électro. Donnant du corps à chacun de leur titre (à part l’incompréhensible « Signes » à la pop rock un peu transparente), Cancre réussit à assombrir le tableau et donner une idée de l’ambiance de fin du monde qui transpire de ces textes puissants. 

Dans une saturation coupante, Cancre se pose en garants d’un rock à la française, sombre, puissant et torturé.  Plein de ces envolées lyriques où les mots viennent frapper une musicalité au rock acéré, les français nous entrainent dans une sorte de revival assumé du rock des années 2000. Sombre à la puissance sèche, la musique du trio nous entraine dans un rock français coup de poing qui fonctionne particulièrement bien. Poussant chaque morceau avec une énergie qui ne se dément pas, Cancre nous touche de sa rage intacte. 

Note : 7.0/10

Arnaud Le Tillau
arnaud.letillau@quai-baco.com