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Date d'ajout : 02-03-15

Texas : le cher visage de son passé

Pour fêter ses 25 ans de carrière, Texas propose, outre quatre inédits dignes d’intérêt , des versions revues de leurs plus grands succès avec le concours de producteurs américains en vogue . Soulignons une démarche artistique humble et louable car c’est un bon moyen de vérifier si ces titres tiennent la route habillés autrement. Si le traitement administré ne change rien au diagnostic.

Une belle chanson ne vaut elle que par l’arrangement marqué au fer de son époque ou est elle intrinsèquement de qualité. Deviendra t’elle intemporelle ou est-elle liée à un moment, tel un amour d’été devenu blafard l’automne arrivant. Le beau sourire sur les rivages de Mimizan devenant rictus au bar tabac glauque de Créteil soleil.

Penchons nous sur le cas de « Summer Son » revisité : la piste de voix en double track est bien identique à la version originale mais cet hymne crypto discoïde au beat résolument dansant, à la basse-scotchée-à-sa-meilleure-amie-pour-la-vie : j’ai nommé la grosse caisse, se voit là métamorphosé en reggae léger et entraînant soutenu par une guitare folk hispanisante. Surprenant à la première écoute, convaincant ensuite.

Car on ne touche pas à ce monument sans risque. Cette chanson d’un amour déçu et déchu est proposée par une Sharleen qui refuse pourtant les règles du genre : cette amoureuse murmure, sussure, au lieu d’hurler sa peine, ce mode d’expression du faible, niant là sa voix de tête et, de plus, l’effet de double captation vocale accentue le propos dramatique et langoureux .

Même au moment du refrain, ce putain de passage obligé de racolage assumé mais tellement sénile- nom d’une chienne, ce que ce clin d’œil vulgaire colle si souvent à la paupière, l’envolée lyrique et prévisible ne se produit pas – elle restera sur son low range tout le long du titre. Elle ne drague pas, ne réclame rien, elle se contente de clamer et déclamer.

Cette déclaration pathétique se veut une réponse définitive au grand Charles qui se demande ce qu’il reste de ses amours. Avec emphase et théâtralité, il se pose des questions, lui le roseau amidonné délicat et précieux, tout étonné de son impertinence. Il se dandine sur le pont de la rivière Kwai un miroir en main. Et c’est bien une hétéro torride qui répondra à l’inverti avec une toute puissance contenue et une pudeur sans égal.

Car elle se retient. Elle, l’écossaise bagarreuse, faux garçon manqué et vraie bombe sensuelle refusera cette facilité narcissique. « Je suis fatiguée de raconter cette histoire à ta manière / voici le fils de l’été, ses mains me touchent, mais cela sonne si faux ». Charles. Il ne reste rien de nos amours, ni même la douleur de leur souvenir, voici la vérité incontestable . Cendres et poussières, l’amour est mort. Et Sharleen a su exprimer comme personne le récit de notre misère affective, cette permanence des années adolescentes. In mémoriam.

Arnaud Berreby – arnaud.berreby@orange.fr


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