Ancien leader des Acrobates, et après 5 ans en solo, Laurent Montagne sort un nouvel album cette fois ci en groupe. « A quoi jouons-nous? » nous emmène dansl’univers à la fois doux et rude teinté de rock et de chanson française de l’originaire de la Drôme.

Laurent fait partie de ces artistes qui s’apprécient après quelques écoutes. En effet, j’ai eu au départ cette impression de chanson française un peu maussade, fade et pâlotte, mais rien de bien fulgurant. Et pourtant…

A l’écoute de « Coloscopie d’un président » on ressent une certaine tension. Le titre, très rock, à la structure saccadée et alambiquée semble exploser sur une fin très instrumentale. Bien que semblant assez commun au premier abord, on ressent vite une véritable force dans ce texte et cette voix. Politique, revendicateur, Laurent Montagne s’inscrit dans la droite ligne d’artistes tels Saez, Mickey 3D ou Prohom, mettant en avant un texte brut et violent dans un écrin rock d’une noirceure et d’un cynisme impressionnant. A fleur de peau le français laisse libre court à son émotion sur un texte vibrant et percutant.

Car il y a ce sens de la droiture chez Laurent, ce côté sans concession que l’on retrouve sur le titre « Prony », son meilleur à mon sens sur cet album. Folk, grave et noir, très nuancé, extrêmement mélodique le morceau nous emporte et nous ficelle. Montant doucement, magnifié par un texte des plus contemplatif, on se laisse prendre par l’émotion qui s’en dégage.

Le français semble s’engager pleinement dans ses compositions et adapter ses arrangement au texte à déclamer comme sur « La chanson des déjà vieux de demain » où traitant la thématique de la vieillesse morale, on est comme hypnotisé par cette voix atypique et ce phrasé lent qui par une mélodie tournante et entêtante, nous fait penser à Jean Louis Murat.

Voix atypique, Laurent Montagne semble pourtant se perdre sur certains titres dans une variété pop rock certes de bonne facture mais à mille lieux de cette revendication qui lui va si bien. C’est ainsi que « Attendre » semble taillé dans un rock calcaire proche d’une pop variété assez banale, un peu fade et sans saveur ou qu’à travers « Parle moi » l’on ressent un Laurent Montagne se cherchant à travers un morceau à la frontière entre un rock véhément et ancré dans une réalité brute et une variété lisse, standardisé et pâlotte.

Le reste de l’album se partage entre titres pop rock assez communs « Le courage des oiseaux » dont le texte de Dominique A colle parfaitement au personnage mais dont l’instrumentation n’apporte pas grand chose par rapport à la version originale qui faut bien le reconnaître reste impressionnante, et morceaux au folk un peu mielleux façon chanson française, aux mélodies très ciselées mais manquant cruellement d’émotion comme sur « L’accident ».

Alors oui, Laurent Montagne nous délivre un album d’une hétérogénéité complexe et presque artistique. A la fois revendicateur et politique, le Drômois nous sert certaines perles musicales de suite reconnaissables et impressionnantes mais se perd parfois dans un style plus variété qui ne semble plus lui convenir. Coup de cœur de l’académie Charles Cros, reste chez ce français un indéniable talent qui fera, j’en suis sûr, nombre d’adeptes.

Arnaud Le Tillau
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