Chérissant entre toutes cette Auvergne qui l’a vu grandir, Jean-Louis Murat nous revient au travers d’un nouvel album intitulé « Babel » en forme d’ode à ce territoire et à ses habitants. Entouré de la crème des artistes locaux, il nous propose un double album fleuve (triple album en vinyles) aux sonorités à la fois douces et rugueuses qui font depuis maintenant 20 ans le bonheur d’un public fidèle.

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Peut-on rêver meilleur ambassadeur que ce rockeur un peu ours qui personnifie une région encore préservée d’une urbanisation massive? Notre Murat national déclare cette fois-ci sa flamme à un territoire faisant parti intégrante de son histoire. Lignes mélodiques claires et lumineuses, voix éraillée et envoûtante, tous les ingrédients du très bon Murat sont en place pour un opus qui apparaît vite comme faisant date dans la discographie de l’Auvergnat.

Accompagné cette fois ci du groupe The Delano Orchestra, co-créateurs du label Kütu Folk, le Français marie avec un goût certain son univers avec une folk riche et débordant d’émotion. Dans une approche toujours très terroir, il nous propose une première partie cuivrée faisant la part belle à des enregistrements acoustiques. Titres sobres aux structures complexes « Chacun vendrait des grives », « Chant Soviet », Murat construit de superbes musiques flottantes et animées aux arrangements semblant désorganisés proches de l’improvisation.

La voix laminaire de l’Auvergnat instille une monotonie addictive qui nous happe. Sur une thématique se rapportant à la faune et à la flore locale (« Blues du Cygne », « La chèvre Alpestre »), il nous chante son amour de la terre passant d’une pop aux arrangements ciselés à une country aux guitares slides fines et au saxo discret sur « Les ronces ».

Alors que le CD1 fait la part belle aux passages instrumentaux et à l’efficacité douce et mélancolique de The Delano Orchestra, Jean-Louis Murat apparaît beaucoup personnel voire intime sur un CD2 plus fouillé. Beaucoup plus homogène que sur le premier volume, il y aborde les thèmes de son enfance « Le jour se lève sur Chamablanc » et des lieux chers à son cœur « Neige et pluie au Sancy », le tout sur des arrangements pop-rock dont lui seul à le secret. The Delano Orchestra prend sur cette partie toute son envergure au travers d’une musique sincère et suffisamment discrète pour laisser le talent de Murat éclater.

Excessivement humain regorgeant de ces fissures et blessures qui forgent un homme, Jean-Louis Murat se montre tel qu’il est. Sincère, touchant et mélancolique, le Français nous propose un double album dense. « Babel » est l’occasion pour cet amoureux de la terre de réaliser des titres un peu plus riche en terme d’orchestration et aux constructions hors format favorisant le ressenti. Murat fait du Murat et laisse vivre sa musique en nous dessinant les contours d’un univers paysan où la vie se conçoit brute et sobre. Superbe !

Arnaud Le Tillau
arnaud.letillau@quai-baco.com