/// CHRONIQUES
Date d'ajout : 03-06-16

The Kills – « Ash & Ice »

Formés en 2000 dans une approche rock garage, The Kills nous reviennent dans une pop rock à la saturation proéminente saupoudrée d’une électro discrète pour un cinquième album dense et complet. Les anglo-américains se plaisent à faire évoluer leur style enchaînant les titres catchy et les très bonnes surprises. Délaissant quelques peu un style académique, ils se démarquent par ce mix réussi entre musique commerciale et expérimentations.

Mêlant tradition et modernité sur « Doing It To Death », The Kills nous dévoilent un premier titre à la lourdeur et à la puissance toute américaine réussissant même à y intégrer une finesse électro superbement amenée. Guitares rugissantes aux riffs à tomber, rythmique dynamique et coulante, les deux compères tracent leur chemin sur une pop rock à l’orchestration puissante et nous délivrent ainsi un titre à la construction classique mais au contenu intéressant.

Lourds et impactants sur une première partie d’album, les anglo-américains trahissent leur trajectoire commerciale au travers de titres comme « Heart of a Dog »  ou « Hard Habit to Break ». Même sobres, ces morceaux remplissent vite le compresseur pour un rendu extrêmement lissé qui les éloigne de plus en plus de ce garage rock dont ils sont issus. Construisant leur morceau sur une imbrication de riffs saturés, ils glissent à chaque pulsation leur vision d’un rock à la puissance un brin surdimensionnée. Occupant pleinement l’espace, ils oublient à grand renfort de cascades vocales une finesse qui ne ferait pas de mal.

S’installant dans un certain confort, leur musique perd ce côté tranchant et urgent qui lui donnerait une impulsion folle. Pourtant on ressent dès « Bitter Fruit » comme une volonté de casser ce cadre, de faire trembler la cage dans laquelle la musique standardisée et les canons commerciaux les ont enfermés. Ils mettent ainsi en place une musique centrée sur une vision tranchante d’un rock émoussé. Reprenant avec beaucoup d’énergie un rock émacié, ils ne peuvent s’empêcher d’y ajouter une puissance grossière aux bourrelets bien remplis.

Perçant quelque peu leur îlot de confort sur « Days of Why and How » puis « Let It Drop », ils apparaissent pleinement créatifs. La rythmique et l’approche instrumentale donnent au tout un sentiment de rock feutré extrêmement addictif. Montant progressivement en puissance, le duo mise tout sur la voix enivrante d’Alison Mosshart. Complexe et pour une fois raffinés, ils prouvent ici leur capacité à dépasser les lourdeurs historiques pour se consacrer à une musique plus déconstruite.

Envoyant du bois à chacun des titres suivants, les Kills imprègnent chacune de leur composition d’une base rythmique haletante qu’ils enrichissent d’un jeu de guitare très présent et la plupart du temps très saturé. Audacieux sur une fin d’album nous faisant oublier un démarrage un peu sage, le duo multiplie les prises de risque à l’image de ce magnifique « Hum for you Buzz » au folk saturé à tomber.

Faisant cohabiter avec beaucoup de grâce titres à la pop-rock sans surprise et compositions de bravoure au rock acéré, The Kills nous emportent sur une fin d’album dantesque. Déconstruisant dans une deuxième partie une pop rock saturée, les anglo-américains délaissent leur côté industriel pour nous immerger progressivement dans une musique au noir intense et au mélodisme fou. Sans révolutionner le style The Kills s’imposent une nouvelle fois comme un groupe innovant et pertinent.

Arnaud Le Tillau
arnaud.letillau@quai-baco.com

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