À l’image de cette Bretagne, carrefour de civilisation à l’identité forte, Yann Tiersen nous propose un 8ème album dense et puissant composé en grande partie en Islande. Travaillant cette fois ci avec différents artistes du nord de l’Europe, il réalise un opus puisant sa force dans des univers linguistiques différents. « Infinity » est dans la droite ligne de ses expérimentations entre rock et illustration sonore.

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Ambiance venteuse et grandiose, mélange de sound design et de pads à la fois lourds et aériens, ce premier titre éponyme « Infinity » pose de suite le décor. Yann Tiersen y intègre progressivement ses ritournelles bretonnisantes. Telle une fanfare dont la musique serait emportée par les vents violents de la côte, ce titre lie avec une sincérité rare atmosphère et musique du pays.

En effet, le Breton ne se dépare pas de ce côté cinématographique qu’il aime par dessus tout. Ici les bruits de la mer, de la nature sauvage embuée d’embruns occupent le terrain. Derrière apparaissent les mélodies semblant accompagner les gestes du quotidien. Musique de fond sonore elle apparaît écorchée, brutale et granuleuse mais extrêmement belle. Tel ces visages de marins burinés par le vent, « Infinity » vit et se débat dans des éléments naturels le dépassant.

Parfois brouillonnes sur « Slippery Stones », les différentes couches instrumentales du breton apparaissent dans un fracas puis se transforment. Au fur et à mesure, un rythme se dégage « A Midsummer Evening » et une chanson apparaît. Pop efficace et toujours soutenue par ces mélodies prenantes et puissantes, il expose en pleine lumière son talent de mélodiste.

Conte breton sur « Ar Maen Bihan », texte anglais mis en valeur sur « Météorites », le Français assume et s’affirme un peu plus en tant que citoyen du monde. Nous enveloppant de ses chœurs « Lights » et structures musicales, Yann Tiersen nous emporte progressivement dans une ambiance noire à la tension palpable.

Ainsi « Steinn » ou « In Our Minds » apportent une dimension mystérieuse proche des contes et légendes. Entre attraction et peur, la musique nous happe dans un univers aux contours flous où les instruments électroniques prennent le relais dominant un fracas bouillonnant et enivrant de sons épars. Il y a dans la musique de Yann Tiersen ce fond d’universalité de souvenirs refoulés, d’enfance heureuse.

À l’image de cette Islande aride et sauvage aux paysages somptueux et inquiétants, le breton en esthète de la construction sonore nous propose un album dense et fougueux aux sonorités sombres. Peuplée de légende, la musique de Yann Tiersen reste éminemment reliée à cette terre celte qu’il chérit ente toutes. Il se dégage de ce « Infinity » un sentiment d’intemporalité.

Arnaud Le Tillau
arnaud.letillau@quai-baco.com