Icône d’une génération, Morrissey nous revient avec un 10ème album solo à la pop rock confortable. Celui qui a conduit jusqu’en 1987 The Smiths d’une main de maître semble de plus en plus s’éroder dans un rock dont il avait le secret. Artiste vieillissant, l’Anglais se repose quelque peu sur sa notoriété en nous proposant un album au long court sans réelle énergie.

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Démarrant sur le très massif et pompeux « World Peace is none of your business », Morrissey nous assomme d’une composition au spectre large et à l’arrangement surdimensionné. Batterie lourde et guitares omniprésentes, le rockeur ne fait pas dans la délicatesse et s’oblige à édulcorer ses compositions d’un surplus instrumental qui devient vite pesant.

À l’image de « Istanbul » ou de « Staircase At the University », la musique de Morrissey tutoie une pop rock classique sonnant très 90’s. Au travers d’une approche proprette et baignée d’une rigueur impitoyable, il nous propose des titres excessivement bien construits et produits, mais manquant cruellement de créativité. On ne ressent aucune flamme, aucune vibration pour cette musique presque mécanique.

Pourtant force est en constater que l’ex-The Smiths garde encore de bons restes. Tout d’abord sur le rugueux « Neal Cassady drops Dead » brutal et épuré ou sur le très conceptuel « I’m Not a man », Morrissey conjugue constructions recherchées et mélodies virevoltantes. Ainsi, travaillant les sonorités sur ce dernier titre pour un rendu lourd et pesant, il joue de sa voix de crooner dans un tout oscillant entre variété américaine et rock noir qui se termine en feux d’artifice mettant en avant ce travail minutieux.

Incapable de proposer des titres simples et frais, Morrissey fait partie de cette génération intégrant Sting ou Phil Collins qui ne conçoivent pas un morceau sans grandiloquence affichée. On ressent dans chaque titre l’aisance et le côté flashy des années 80. Au travers de morceaux produits à la perfection (il n’y a qu’à écouter le son des guitares et de la batterie pour se faire une idée), Morrissey nous emporte un peu plus dans une pop confortable dont ses fans raffolent.

Sans grande surprise la musique standardisée de ce 10ème album fonctionne plutôt bien mais manque cruellement d’originalité. Malgré quelques bonnes idées, Morrissey s’enfonce dans une pop commune complètement aseptisée usant et abusant des canons musicaux 90’s. À l’image de ces ventres bedonnants naissant lorsque le poids des années se fait sentir, la musique de Morrissey pâtit quelque peu d´un surplus de calories musicales et semble progressivement se lover dans un écrin confortable annihilant toute énergie créatrice.

Arnaud Le Tillau
arnaud.letillau@quai-baco.com