/// CHRONIQUES
Date d'ajout : 03-12-15

Johnny Hallyday – « De l’Amour »

Pour son cinquantième album, Johnny Hallyday s’est une fois de plus entouré de la crème des artistes français, de cette génération surdouée qui fait les belles heures de la nouvelle chanson française. Mise en musique par l’indispensable Yodelice alias Maxim Nucci, ce nouvel album fait la part belle aux sonorités rétro qui collent parfaitement à la voix du rockeur. Une année après un « Rester vivant » en forme de renaissance, Johnny continue sa mutation avec ce « De l’Amour » très réussi.

C’est dans une ambiance excessivement rockabily que notre Johnny national ouvre le bal avec un « De l’Amour » éponyme à la sobriété rock. Comme un retour aux sources, le Français revisite à sa sauce un vintage décidément très à la mode. On y retrouve l’esthétique noir et brillante de Yodelice dans ce chevauchement de sonorités bluesy et pop qui donne au tout une véritable profondeur. Le titre tire bien son épingle du jeu par une instrumentation efficace et tranchante.

Dans cette façon unique qu’il a de théâtraliser des compositions graves et percutantes, Johnny Hallyday nous bouscule de sa voix à la solennité de plus en plus présente. Car le rockeur semble sur ce nouvel album assumer pleinement son âge. Sans réellement changer du tout au tout, il met progressivement son rock impulsif de côté pour une pop rock granuleuse et bienveillante. Fin malgré quelques grosses ficelles sur le très beau texte de Vincent Delerm « Une vie à l’envers », Johnny Hallyday apparaît pourtant presque caricatural sur un « Dans la peau de Mike Brown » poussif et sans relief.

Rendant flatteur à peu et frais des compositions la plupart du temps très bien écrites, il semble une fois de plus otage de son propre personnage. Ainsi sur le slow calculé « Tu es là » ou sur le country folklorique « Des raisons d’espérer », le Français nous lasse de sa mécanique un peu trop bien huilée.

Malgré cela comme sur « Rester Vivant », on sent que le français fend au fur et à mesure l’armure plus ou moins maladroitement. Émouvant sur un « Un dimanche de janvier » ou « Valise ou cercueil », il construit avec sincérité un album abordant des thématiques actuelles sans tomber complètement dans le piège des bons sentiments.

Noir c’est la couleur dominante de ce « De l’Amour » qui apparaît d’une sérénité rarement atteinte par un Johnny Hallyday en pleine mutation. Tel un homme épuisé et essoufflé par une vie éreintante, l’artiste se pose sur une musique sombre et nous dévoile ses failles et ses états d’âme. Semblant assumer pleinement son vieillissement, le Français montre sans pudeur un visage buriné et forgé par le temps qui nous touche.

Arnaud Le Tillau
arnaud.letillau@quai-baco.com


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