/// CHRONIQUES
Date d'ajout : 27-09-18

Elisapie – « The Ballad Of The Runaway Girl »

C’est avant tout une histoire de liberté, de celle qui trop présente nous oppresse. Elisapie Isaac vient du grand froid canadien en territoire Inuit. Fuyant ces espaces sans fin, elle se stabilise à Montréal où après 2 albums solo elle nous présente un « The Ballad Of The Runaway Girl » en forme de retour assumé à son passé et à ses racines. Dessinant un folk éblouissant aux envolés tribales, Elisapie nous transporte dans un univers aux contours clair-obscur qui vite nous rend addict. 

Elisapie - « The Ballad Of The Runaway Girl » : La chroniqueAux confins du folk et de la musique ethnique, Elisapie nous entraine avec vigueur sur un premier titre assourdissant d’émotion dans un univers puissant et survolté. Ce « Arnaq », loin d’en être une, pose de suite le décor de la musique unique que la jeune Inuit nous propose avec un sens rare de la construction. Jouant avec les sonorités électriques, elle propulse son folk dans un amas proche de l’expérimentation. Brutale et rugueuse sa folk pleine de guitares grattantes et de cuivres hurlants nous transporte dans un univers jusqu’ici inconnu. Il y’a dans la musique de cette femme venue de l’Arctique une promesse de nouveauté, de changement et un talent hors norme pour les constructions de titres exceptionnellement bruts.

Froide dans son approche d’une musique scintillante et fine, Elisapie nous propulse avec une infinie délicatesse dans sa vision d’un folk aux paysages lourds et puissants. Construisant avec une franchise rare, des morceaux au folk resplendissant, elle nous souffle de la façon dont elle intègre son univers à ces mélodies. Proche d’un Other Lives dans cette approche unique d’un folk aussi bien grandiloquent qu’intimiste, la jeune femme réussit à donner à ce style un second souffle grâce à son histoire atypique.

Il y a dans sa musique cette authenticité qu’on ne retrouve plus guère dans ce style. Capable de grandes envolées comme sur « Don’t Make Me Blue », elle compose avec un sens aiguë de la mélodie et de la construction pour nous livrer de petits bijoux folk qui ne cessent de nous obséder. On est transporté par cette force qu’elle insuffle à chacune de ses compositions. Une sorte de puissance sous jacente qui se déploie discrètement et réussit à éclater dans un bouquet final impressionnant. Profondément juste, chacun des titres de cet album nous émeut de leur rendu rare.

Voix enchanteresse « Una », approche fine et mélancolique « Call of the Moose », tout chez la jeune femme nous impressionne. On est comme happés par sa façon qu’elle a de nous transporter dans un monde aux couleurs chaleureuses et rondes. Doucement, chaque note nous immerge un peu plus dans un univers au folk resplendissant et fourmillant d’idées. Dans une instrumentation à la noirceur frissonnante, Elisapie réussit à nous enivrer de son folk qui nous enveloppe de son univers remuant pour ne plus jamais nous laisser tranquille.

Fine et puissante, la folk d’Elisapie trouve son chemin loin des sentiers battus et nous transmet avec un bonheur indicible une joie de vivre et une mélancolie folle. Travaillant avec les tripes des mélodies à la croisée du tribal et de la country, la jeune Inuit compose selon son propre référentiel et invente un nouveau style aux envolées frissonnantes et aux calmes intimistes qui ne nous laisse pas indifférent. Quelle claque que cette artiste sortie de nulle part qui nous impose avec une énergie rare une nouvelle façon de penser la folk. Il y a chez Elisapie cette folie et cette évidence que l’on pouvait trouver il y a quelques années de cela chez Björk. Ne respectant aucune limites ni aucun schéma existant, elle s’affranchit des canons du genre pour inventer sa propre vision d’un folk collant et diablement addictif.

Arnaud Le Tillau
arnaud.letillau@quai-baco.com


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