/// CHRONIQUES
Date d'ajout : 29-01-17

Dick Annegarn – « Twist »

Originaire de Hollande mais ayant vécu en Belgique c’est à Paris que Dick Annegarn a pu prendre son envol en parfait autodidacte dans les années 70. Lassé du label tôt ou tard c’est sur un nouveau label (Musique Sauvage) qu’il nous propose un nouvel album intitulé simplement « Twist » qui apparaît comme l’une de ses meilleures productions.

Orchestration minimaliste et rude, Dick Annegarn ne fait pas dans la dentelle et nous enivre d’un premier titre osseux et entier. Granuleuse et ne s’encombrant pas d’instrumentation lourde, le Belge porte à bout de bras un « Roule ma Poule » aiguisé au plus près d’une misère populaire tranchante. Entre douceur et rudesse, il apparaît comme l’un des derniers représentants d’une chanson française de caractère, poétique et revendicatrice. Pleinement brute dans son approche musicale il se concentre sur l’essentiel en mode essentiellement acoustique.

De sa voix grave et éreinté il porte en lui une expérience magnifiée par cette approche poétique entre rudesse et douceur. S’imprégnant le plus possible de musique humaine il met un point d’orgue à ne s´entourer que d’instruments acoustique et vocaux. Le résultat est magnifique et donne au vintage un coup de vieux. Chez Dick c’est l’authenticité qui porte tout, à l’image de « Au marché des mendiants » ou « Dure la vie ».

Avec Dick Annegarn, la chanson française apparaît dans son plus simple appareil dans des compositions portées par des mélodies accrocheuses et élimées. Ne cessant d’innover dans un étui au caractère fort, il nous propose une plongée dans la chanson française vécue à la Brel. Il donne à chacune de ses compositions une âme forte qui semble parcheminée d’une musique à la fois nuancée et poétique. Loin de faire dans la facilité il se dresse en pourfendeur de compositions sans compromis et animées d’une violence humaine que l’on a plus l’habitude d’entendre.

Roulant des r, poussant le texte dans ses retranchements, grattant une instrumentation la plus discrète possible, Dick Annegarn donne à la chanson française ses lettres de noblesse. Convoquant Ferré ou Lepriest, il part en chanson comme on part au front. Puissance du texte, voix éraillée, taquinant aussi le jazz populaire dans un duo avec Raphaël, il domine son sujet à force de rythmique déjantée et d’une instrumentation complètement barrée.

Dick Annegarn apparaît libre de tout mouvement et de toute musique. Mettant ses textes granuleux au premier plan, il dessine un album à la profondeur indicible et à la sobriété cassante. Loin d’enrober sa prose dans une instrumentation glucosée, il nous déroute par la pauvreté laminaire de ses arrangements qui finissent parfois même à capella comme sur le dernier titre de l’album. Dans son costume d’amuseur public il gagne en galon dans cet album franc et direct révélant une fois de plus quel compositeur et interprète il est.

Arnaud Le Tillau
arnaud.letillau@quai-baco.com


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