Confirmant cette surprenante renaissance en crooner fragile et mélancolique, Bill Fay nous propose un nouvel album véritable suite logique de son extraordinaire « Life is People ». Celui qui commença comme rockeur dans les années 70, profite pleinement de son retour en grâce nous emportant une nouvelle fois dans un « Who Is The Sender ?» pénétrant.

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Possédant cette fragilité construite sur une personnalité robuste, Bill Fay creuse avec beaucoup d’intelligence sa part émotionnelle dans un premier titre mélodique à souhait. « The geese are flying Westward » nous ouvre la voie de ce nouvel opus toujours autant introspectif mais à l’instrumentation riche et réfléchie. Mélangeant avec élégance et raffinement pop mélodique et country harmonique, l’Américain nous balance avec sérénité des titres frissonnants.

Il y a chez Bill Fay cette propension à rendre denses et profondes de véritables perles mélodiques. Toujours accompagné d’un piano donnant au tout une certaine solennité, il s’attaque à la beauté avec une facilité désarmante peuplant chacune et ses compositions d’une mélancolie infinie qui finit par nous faire fondre à l’image du très beau « Underneath the Sun ».

Délaissant parfois la sérénité d’une rencontre piano-voix orchestrale, il se glisse dans un écrin pop rock pour servir de véritables bijoux musicaux aux faux airs de Kurt Vile. Ainsi sur « How Little », il construit une ode musicale qui rapidement nous gagne et dont les motifs sonores superbement agencés apparaissent vite indispensables surtout lorsqu’ils sont saupoudrer de cette voix inimitable au timbre émoussé et rond.

Proche d’un Eels sur un « Somethings Else Ahead » à la nostalgie plaintive, il semble apparaître de plus en plus grandiloquent au fur et à mesure que les titres s’écoulent. Satisfaisant un besoin vital de faire émerger la beauté avec beaucoup d’emphase, lyrique en terme d’instrumentation et intime en terme de chant, l’Américain nous convainc sans difficulté sur « Who Is The Sender ? » s’étirant de toute sa noblesse.

Car oui il y a une certaine noblesse, une classe indéfinissable dans l’approche sobre et élégante de ce vieux monsieur dans la force de l’âge qui réussit à nous impressionner une nouvelle fois. Malgré quelques écarts qui le voient utiliser plus qu’il ne le faut une musique mièvre et pompeuse « Order of the Day », l’Américain nous sert un album lumineux.

Peut-on parler de reconversion ? Bill Fay semble avoir toujours incarné ces musiques qui, frêles et fragiles, n’auraient pu être portées par le rockeur d’alors. En brisant cette barrière, un trop plein d’émotion semble avoir atteint l’artiste. Le résultat sont ces 2 albums composés à 3 ans d’intervalles. Alors que « Life is People » nous révélait un Bill Fay transfigurer, presque christique seul avec son piano et sa voix fatiguée, ce « Who Is The Sender ? » nous présente un artiste assumant pleinement cette nouvelle direction artistique et l’exploitant pleinement. Nourrissant une œuvre simple et puissante, cet album prouve que le rebond fait parti des artifices artistique les plus efficaces.

Arnaud Le Tillau
arnaud.letillau@quai-baco.com